Drame qu’on aurait pu et dû éviter : la police savait et ne cessait d’intervenir
MOLENBEEK Une femme de 25 ans, Annelise Calonne, a été battue à mort par son compagnon Muhamed El Haddadi sorti récemment de prison, jeudi, dans la commune bruxelloise de Molenbeek. À la façon dont le légiste décrit l’état de la victime “presque totalement couverte par les hématomes, visage et corps” , celle-ci n’était plus qu’une plaie.
Le couple louait à des Albanais une sorte de chambre au quatrième étage, le dernier sous les toits du 79 rue Vanderdussen. C’est peu dire que les disputes étaient incessantes.
Il y a quinze jours, la police était encore intervenue et les voisins avaient constaté que El Haddadi avait encore été relâché au bout de quelques heures.
Alors, plusieurs avaient décidé de régler l’affaire eux-mêmes. Au moins deux nous disent qu’ils l’avaient pris à part pour “lui faire son affaire” et lui “faire entrer dans le crâne, parce qu’il n’y a que ça qu’il comprenait, cet enfoiré” , qu’on ne bat pas sa femme.
Le voisinage décrit des scènes impressionnantes. “Une nuit, ce type est sorti en slip en rue et a couru pour rattraper sa femme qui s’était cachée dans le salon lavoir. Des scènes comme ça, on ne les comptait plus.”
Et pourtant, Annelise Calonne semblait accepter son sort. “Elle était dingue de lui. Quand on lui disait : Mais quitte-le, tu ne peux pas continuer comme cela, il te tuera. Retourne vivre chez ta mère, Annelise répliquait : Et quoi, tu crois que je suis la seule femme battue en Belgique ?”
C’est ce que confirme Mustapha, l’épicier d’en face. “Jamais pour des fruits ou des légumes. Avec elle, c’était Marlboro rouges et cartes de téléphone. Elle faisait pitié.”
Et quand la police intervenait, elle embarquait le copain et relâchait Muhamed quelques heures plus tard. “Et disons que pendant trois jours, ça allait mieux.” Car Annelise revenait.
Annelise était, selon ses voisins, une “jolie petite brune, oui, une jolie femme” . Les mêmes disent que, ces derniers temps, “on aurait dit un squelette ”.
Il y a 15 jours, à la précédente intervention de la police, Annelise Calonne avait annoncé aux voisins qu’elle était enceinte. Jeudi, El Haddadi prétend l’avoir trouvée à 17 h gisant sur le plancher. Il n’a rien fait pendant trois heures puisqu’il est 20 h quand il se décide enfin à alerter les secours, et 20 h 21 à l’arrivée de la police qui a fait vite : elle connaissait très bien le chemin.
Au 4e, les scellés empêchent d’entrer. Nous dénombrons sur la porte une demi-douzaine de coups, de pied et de poing dont un a traversé l’épaisseur du bois. Résultat des bagarres et des violences qui avaient lieu ?
Le couple s’adonnait fortement à la boisson et à la drogue.
via l’orifice dans la porte, on voit dans la pièce comment ces gens vivaient : désordre, papier W.-C. et matelas à terre. Annelise Calonne était née le 23 juin 1984.
Elle venait d’Ottignies-Louvain-la-Neuve. Dans un moment où elle pensait quitter son tabasseur, elle avait songé s’installer rue Général Tombeur à Etterbeek. Si elle s’était décidée, elle n’aurait pas payé de sa vie la violence des mâles qui cognent.
recit
Gilbert Dupont